Edito d'Alain Rousset, Président du comité de bassin Adour-Garonne
#122

L’eau est aujourd’hui une priorité nationale et nos appels ont été entendus.
Les moyens d’intervention des Agences renforcés dans le cadre du Plan eau vont permettre de financer des projets indispensables pour préparer l’avenir face à la moindre disponibilité de l’eau. En Adour-Garonne, de véritables stratégies ont été élaborées par les établissements publics territoriaux de bassin, à l’échelle des sous-bassins pour répondre aux enjeux liés à la quantité d’eau disponible. Ces feuilles de route, porteuses de près de 850 millions de m3 d’économies, constituent une part importante de la réponse à l’exercice de planification écologique national.
L’objectif de 10 % d’économie d’eau sur l’ensemble des usages fait de la sobriété un impératif pour tous. C’est un rappel du fait que pour répondre aux enjeux de l’eau, nous devrons faire preuve de solidarité entre acteurs et entre générations.
Cette solidarité est déjà au cœur de l’action de l’agence de l’eau, de son comité de bassin et des structures de gouvernance locale dans les sous-bassins. Au quotidien, nous cherchons à bâtir cette entente entre des porteurs d’intérêts parfois divergents, planifions les actions et réalisons les arbitrages lorsqu’ils sont nécessaires.
Notre fiscalité même instaure un principe de solidarité. L’ensemble du programme d’actions que nous mettrons en œuvre pour la ressource, y compris dans le cadre du Plan eau, reste financé par les redevances que nous percevons sur ces usages. Le Comité de bassin du mois de juillet prochain sera amené à se prononcer sur sa future stratégie fiscale à l’aune des nouvelles marges de manœuvre permises par le Plan.
Des moyens nouveaux donnés aux agences sont, de fait, indispensables pour financer les besoins d’investissements en matière d’adaptation des territoires au changement climatique : reconquérir la qualité de l’eau des captages, parvenir à la mise aux normes des stations d’épuration qui le nécessitent encore, accélérer la transition agricole et diminuer le recours aux intrants, désimperméabiliser les sols, renaturer nos rivières…
Mais dans l’immédiat, le temps presse pour préparer le printemps et l’été 2023. Le scénario d’une nouvelle sécheresse couplée à une faible recharge des nappes et réserves nous expose, s’il se confirme, à des difficultés majeures bien au-delà de celles que nous avons rencontrées en 2022.
Malgré les précipitations de ces dernières semaines, la situation demeure très préoccupante dans le grand Sud-Ouest. La période hivernale n’a pas permis de recharger les nappes et réserves de notre bassin. Les milieux aquatiques restent fortement affectés, notamment dans les têtes de bassin.
Près de 240 000 habitants sont déjà touchés par des difficultés d’alimentation en eau potable. Les communes concernées ont recours à des interconnexions de réseaux ou des captages exceptionnels, à l’alimentation par des camions citernes ou à la distribution d’eau en bouteille.
Les prévisions sur les trois prochains mois sont porteuses de fortes incertitudes sur les tendances en températures et en précipitations : la situation est extrêmement fragile et il faudra s’y adapter. Si un nouvel épisode est aujourd’hui plausible, ses conséquences seront sans précédent. Anticiper est pour chacun de nous un devoir
Ainsi, nous devons adopter, dès à présent, toutes les stratégies qui permettront de modérer les effets du manque d’eau.
C’est dans cet esprit de responsabilité que j’ai réuni les représentants agricoles dès le 18 janvier, puis l’ensemble des acteurs de l’eau, le 24 mars dernier, pour partager l’état hydrologique du bassin et les inciter d’ores et déjà à adopter des mesures d’économie d’eau afin d’amortir autant que possible les effets d’une plausible sécheresse sévère. Je poursuivrai cet effort de transparence, de mise en responsabilité et de partage des enjeux comme des moyens, qui constitue une des conditions de la réussite de notre adaptation à court, moyen et long terme.